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Bock, Dopplebock et dix de der
 

Dans la grande famille des bières allemandes, il en est une aussi fondamentale que méconnue : les Bock. On essaye d’y comprendre quelque chose ?

Les Bock forment aujourd’hui une famille de bières ayant pour point commun une densité initiale égale ou supérieure à 16° plato (DI 1065), soit un degré d’alcool supérieur à 6,5%. Dans la législation allemande, elles sont aujourd’hui appelées « Starkbiere », littéralement « bières fortes ». Historiquement sombres, elles peuvent aujourd’hui être blondes, cuivrées ou noires.

Les Bockbier tiennent leurs origines de la ville d’Einbeck en Basse-Saxe, au sud d’Hanovre et à quelques kilomètres au nord de la ville rendue célèbre par Barbara, Göttingen.

Des origines au XIVe siècle

L’histoire brassicole d’Einbeck commence vraisemblablement au XIIIème siècle, même si l’un des plus anciens documents brassicoles écrits d’Allemagne est une facture de la brasserie locale Einbecker, datant de 1378. Celle-ci évoque l’exportation de 2000L de bière vers la ville de Celle, située à une centaine de kilomètres d’Einbeck.

Le succès de la bière d’Einbeck vient probablement de sa particularité : par souci de conservation et surement par volonté d’exporter leur breuvage, les brasseurs d’Einbecker décident de brasser une bière forte (densité du mout élevée) et abondamment houblonnée. Einbeck est ce que l’on appelle au Moyen-âge une ville hanséatique, c’est-à-dire qu’elle fait partie de la ligue marchande de la Hanse. On sait aujourd’hui que dès le XIVème siècle, leur bière s’exporte à Munich, Hambourg, Tallin, Riga, Anvers ou Amsterdam. C’est d’ailleurs en Bavière que ce style va connaitre son essor et son succès dans toute l’Allemagne. Initialement appelées Ainpockisch Bier à Einbeck, les Bavarois vont transformer l’appellation en UrBock au XVIIème siècle. Urbock évoquant alors la Bockbier traditionnelle et historique à la façon d’Einbeck.

C’est à cette époque qu’un groupe de moines munichois de l’ordre des Minimes, aussi appelé « Paulaner », s’inspire de la UrBock pour brasser une bière encore plus riche en malt : la Doppelbock est née.  A cette époque la bière est généralement brassée lors des évènements religieux comme Noël, Pâques ou le Carême. Les moines s’imposaient un jeûne durant ces fêtes. En revanche le liquide était autorisé. L’idée de brasser une bière puissante et richement maltée pour leur apporter nutriment leur est donc venu naturellement. Ils vont l’appeler la Salvator (Sauveur en latin). Le suffixe -ator est encore aujourd’hui très utilisé dans les noms de Doppelbock (ex : Maximator, Triumphator).

Au XVIIIème siècle, le succès grandissant des Lagers allemandes dorées et limpides pousse les brasseurs de Bock à une petite mise à jour : la Mai-Bock ou Helles Bock. Cette dernière sera toujours aussi forte (6,5-7,8%) mais cette fois ci, portera une robe claire. Comme son nom l’indique, cette bière saisonnière est brassée pour être consommé au début du printemps (le « mai » de « maibock ») jusqu’à la fin de l’été. Elle offre à la ville d’Einbeck une jolie fête de la bière chaque année, le dernier week-end d’avril.

Une bock allant jusque… 30% d’alcool/vol

Autre Bock saisonnière historique, le Winterbock, variante à la robe plus sombre de la Urbock traditionnelle, brassée au moment des fêtes, à l’image de notre bière de Noel.

Au XIXème siècle, l’erreur d’un jeune apprentis-brasseur va être à l’origine de la création d’un nouveau style de Bock, les Eisbock ! La légende raconte qu’un jour, ce jeune brasseur aurait oublié toute une nuit dehors, par température négative, des tonneaux de Doppelbock. Le maître brasseur aurait découvert sa bière en partie congelée le lendemain matin et aurait puni le jeune étourdi en l’obligeant à boire la partie du breuvage encore liquide, la pensant bonne à jeter. L’alcool ne congelant qu’a moins 117°C, ce liquide était très fortement alcoolisé. Et la surprise fut plutôt bonne. La puissance de l’alcool n’était pas désagréable et la concentration des arômes créait une bière complexe et puissante. De nos jours, la méthode est adoptée et maitrisée par les brasseries modernes. Une Eisbock (de « Eis », glace en allemand) est obtenue par congélation d’une partie d’un mout de Doppelbock. Elle titre généralement au-delà de 12% d’alcool (parfois jusqu’à 30% !).

Enfin on trouve également aujourd’hui des Weizenbock. Comme son nom l’indique (« weizen » signifiant blé en allemand) ces Bockbier sont brassées avec une grande quantité de blé, en remplacement de l’orge. Elles sont également déclinées en Weizendoppelbock ou Weizeneisbock selon la puissance de leur degré d’alcool.